Passions

A quoi pensons-nous en premier en tant qu’être humain, petite fourmi dans l’univers ? A notre existence bien sûr, à la vie en général. Quel est le sens de notre vie, comment la vie est-elle apparue ? Pourquoi quelque chose plutôt que rien ?

Le pavé de Jean Staune « Notre existence a-t-elle un sens » est une bonne entrée en matière pour entrer dans ces sujets. A mi-chemin entre sociologie, biologie (évolution), philosophie, et sciences physiques, le questionnement est bien posé et les analyses sont riches.

En fait avec le recul, je me suis passionné pour trois grandes questions correspondant chacune à trois domaines scientifiques. Trois grandes questions qui tourmentent les hommes et les femmes depuis toujours !

Qu’est-ce que la vie, son origine ? Domaine : Biologie

Qu’est-ce que la pensée, la conscience ? Domaine : Neurosciences (Cerveau)

Qu’est-ce que la matière ? Domaine : Physique

Biologie

La biologie est une science récente, et je pense que l’un des premiers ouvrages modernes qui a fait date (pour moi en tout cas) est celui de Jacob et Monod « Le hasard et la nécessité ».

L’évolution des espèces, notre histoire d’être vivant, voilà un sujet passionnant, entamé déjà depuis plus de 150 ans par Darwin et un peu avant lui Lamarck. Je ne comprends toujours pas qu’aux USA l’enseignement remette en cause l’évolution. Le créationnisme est une aberration, comme l’était la génération spontanée des adversaires de Pasteur. Mais l’obscurantisme nous entoure, favorisé par la bêtise des moutons de Panurge qui ânonnent les leçons des religieux.

Je crois bien que la compréhension du code génétique fut pour moi un grand moment d’étonnement et d’admiration. La nature utilisant des « codes » et des « messages » est au départ une constatation troublante. Il est normal alors que beaucoup soient tentés devant l’extraordinaire richesse et subtilité du vivant de se réfugier derrière un concept de « Grand Horloger », d’un « architecte » qui aurait créé tout cela.

Parmi les auteurs majeurs qui m’ont marqué, l’un des principaux est Henri Laborit. C’est lui qui m’a convaincu de la thèse du problème inhérent aux êtres humains : cette malsaine pulsion de domination, venue du fond des âges et qui ressurgit périodiquement chez tous les petits chefaillons, guerriers, roitelets et dictateurs.

Voir « La nouvelle Grille » et « Biologie et Structure ».

Par contre je n’ai pas compris le revirement religieux de Laborit sur la toute fin de sa vie.

L’un des concepts les plus intéressants pour réfléchir sur le vivant est sans nul doute l’auto-organisation. Plusieurs scientifiques m’ont éclairé sur ce sujet, notamment Edgar Morin et Ylia Prigogine.

Edgar Morin (https://fr.wikipedia.org/wiki/Edgar_Morin)  : c’est peut-être l’un des esprits contemporains qui m’a le plus enchanté intellectuellement. Un homme tout à la fois philosophe, savant, humaniste, riche de cette belle humanité faite d’ouverture et d’intelligence. Morin a écrit plusieurs ouvrages très intéressants en sociologie et son œuvre majeure est « La méthode », avec des titres qui sont typiques de son esprit : « la vie de la vie », « la nature de la nature », « l’humanité de l’humanité » etc… Morin a développé l’idée de la pensée complexe et il a intégré avant tout le monde (je pense mais je n’en suis pas certain) le concept de l’émergence. La vie émerge par la réunion de facteurs présents dans certaines conditions. Si je devais répondre à la fameuse question quels bouquins emporteriez-vous sur une île déserte, ceux de Morin seraient dans ma valise. La complexité est devenue un domaine de recherche, j’ai fréquenté un peu de loin l’unité universitaire qui a été créée avec des domaines de recherches tout azimut : sociologie, finance, santé, … la complexité est à la croisée de toutes les spécialités.

Complexité

Pour avoir une vision générale des systèmes complexes, je recommande spécialement le bouquin de Hervé Zwirn « Les systèmes complexes ». Il dresse un inventaire détaillé des approches mathématiques et des modélisations possibles.

En fait les systèmes complexes sont en termes plus matheux des systèmes dynamiques. Cette branche a été initiée par Henri Poincaré (le mathématicien pas son cousin le Président Raymond Poincaré). Poincaré était génial et il s’est frotté au problème du chaos (voir le problème des trois corps en astronomie). C’est lui qui a mis en évidence le premier les comportements chaotiques des systèmes non linéaires, sensibles aux conditions initiales. J’ai tenté plusieurs fois de rentrer dans la théorie des systèmes dynamiques mais j’avoue que c’est compliqué et assez indigeste. Je voulais notamment comprendre l’engouement pour René Thom, (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ren%C3%A9_Thom) autre génie matheux français mondialement connu pour sa « théorie des catastrophes ».

En fait tout ce qui nous entoure est « système dynamique ». Nos calculs en mécanique, en physique ne sont que des approches simplifiées. Même les plus grands ordinateurs du monde sont impuissants pour traiter des systèmes chaotiques, on ne peut que se contenter de certaines marges d’erreurs. Bien sûr la météo en est le meilleur exemple.

Que faut-il retenir de tout ça ? Pour moi les enseignements principaux sont les bassins d’attraction et l’ordre gratuit. Pour certains systèmes dynamiques le système converge vers des « bassins » et reste piégé, ce sont des systèmes attracteurs pouvant être relativement stables. L’ordre gratuit veut dire que dans certaines configurations (par exemple un réseau de N objets pouvant être soit actif ou inactif, chaque état dépendant de l’état de deux autres objets au maximum), un système peut évoluer de façon autonome avec un ordre presque « naturel ».   

En tout cas la cellule semble être un système auto-organisé, régulé par des cycles et des « systèmes attracteurs », déclenchés et orchestrés en partie par les gênes. On a du mal à percevoir des phénomènes aussi imbriqués dans des milliers de cascades de réactions chimiques en chaîne. 

Je reviendrai sur le cerveau et l’idée maitresse qu’une pensée ou qu’une action cérébrale soit une topologie particulière des réseaux de neurones actifs, pulsant à une certaine fréquence homogène, assimilable à un système attracteur.

Je recommande les ouvrages de Stuart Kauffmann (http://www.lesinfluences.fr/Kauffman-Stuart.html), de Roger Penrose , Gell-Mann (le Quark et le Jaguar)  de Delahaye (Information, complexité et hasard)

Autres livres intéressants : Emergence, Complexité et Dialectique par Lucien Seve, Le Hasard Sauvage par Nassim Taleb, la création de la vie par Michel Bounias 

Cerveau

Le cerveau est l’un de mes principaux centres d’intérêt. Comme la recherche avance à grands pas, ce domaine est très excitant : l’univers cérébral va peut-être nous livrer l’un des ultimes secrets, celui du code neuronal.

L’une des plus grandes découvertes humaines est (pour moi) le code génétique : la vie est transmise avec une « formule » très simple ! Les briques moléculaires de bases servant à fabriquer les protéines, les acides aminés, sont représentés par des symboles, les triplets (appelés codons) formés par les bases nucléotides A,T, C, G ( adénine, thymine, cytosine, guanine) qui sont les « barreaux de l’échelle »  ADN. Tout se passe comme le code ADN était un texte composé de phrases avec des mots (codons). L’ADN livre la recette des enchaînements de ces « codons » et les milliers de protéines nécessaires à la vie sont fabriquées ainsi. Le langage génétique est simple et efficace.

Qu’en est-il de notre cerveau ? A quoi correspond une pensée ? Comment apprend-on ? Comment fonctionne la mémoire ? La conscience ? Qu’est-ce que l’esprit ?

Toutes ces questions sont certainement à notre portée et j’ai toujours rêvé qu’un jour, un Champollion du cerveau trouve ce fameux « code neuronal ». 

Ce sera certainement l’une des plus grandes découvertes humaines mais également un risque majeur : la porte ouverte aux androïdes, aux manipulations mentales à grandes échelles, peut-être même la fin de notre « liberté mentale ». Mais c’est un autre débat (rappelons-nous que la découverte de l’atome nous a amené l’arsenal de destruction de la planète).

Je résume ci-après des idées formulées dans le livre « Petite mathématique du cerveau » » de Berrou et Gripon.

Tout d’abord il s’agit d’imaginer comment le cerveau « fabrique » ou « met en forme » une information, de façon aussi à pouvoir la retrouver à la demande, et la corriger éventuellement si elle est altérée. Par rapport à notre expérience des sciences de l’information, il s’agit de trouver comment le cerveau code un « message » et ensuite le décode. Si je code par exemple le mot « main » il faut que je sois capable de l’identifier même s’il manque une lettre, comme *ain ou m*in. En général la solution est d’ajouter au message « main » un autre bout de code qui sert à authentifier le premier. En informatique ces questions ont été au centre de nombreuses recherches : depuis le fameux bit de parité sur l’octet, jusqu’aux normes CD-ROM, et les normes 3G et 4G de la téléphonie mobile.

Ce livre de Berrou et Gripon tente donc une modélisation de « l’information mentale » et leur théorie est à mon avis une approche très convaincante. On retrouve la beauté d’une solution simple, efficace ou plutôt efficiente : la nature trouve des moyens économes, astucieux, pour réaliser des prouesses. Nos cents milliards de neurones avec leurs 10000 connexions par neurone sont les instruments d’un grand orchestre jouant une innombrable quantité de partitions de musiques …

Voici en quelques lignes les principes et les challenges du « code neuronal » :

  • apprendre de la nouveauté en permanence et restituer à la demande cette information sans erreur (le moins possible) : coder et décoder des millions d’informations …
  • à partir d’un fragment de l’information, pouvoir la retrouver entièrement. Si je cherche le nom d’un acteur par exemple, les indices de son prénom et d’un film suffisent à le retrouver.
  •  Consommer le moins possible d’énergie
  • Posséder une hiérarchie de niveaux : un groupe de neurones (les auteurs le nomment « microcolonne ») est le premier niveau, c’est celui qui code un caractère (une mesure de n’importe quoi, par exemple un degré de température, une couleur, une distance etc…). le deuxième niveau est celui de la clique (voir plus loin la définition : graphe reliant des sommets un a un). La clique relie des microcolonnes et porte l’information structurée (ce que les auteurs ont nommé « infon »). Cette information est une donnée rassemblant plusieurs caractères : c’est donc une pensée, du type « mon domicile » avec l’adresse, la topologie du lieu, le mobilier, le prix d’achat, etc.. (On pourrait presque penser à une table de base relationnelle avec les colonnes pour les caractères et les lignes pour les cliques…)

Le troisième niveau est l’enchaînement de pensées : une suite de cliques reliées entre elles, une super structure. On suppose que la conscience est de ce type.

Biologiquement on sait très bien décrire l’activité des neurones : un neurone reçoit des courants électriques en amont par des autres neurones reliés à lui par ses synapses et à son tour, si la somme de ce qu’il a reçu dépasse un certain seuil, il envoie une décharge électrique par son axone à un autre neurone.

L’idée centrale est que l’information mentale est codée par la géométrie d’un groupe de neurones (clique) et que l’activation d’un des sommets de ce graphe réactive par itérations successives l’ensemble du groupe (comme un attracteur d’un système dynamique). Le processus de Hebb ou loi de Hebb, qui consiste au renforcement des liaisons synaptiques entre neurones ayant des affinités, est au cœur du mécanisme biologique permettant le « codage neuronal ».

Par exemple si je schématise : prenons la tour Eiffel. Le concept mental de la tour Eiffel est un ensemble d’informations codés sous forme élémentaires, mettons par une centaine de neurones (ou groupes de neurones) formant une clique (tous les sommets sont reliés). Un code élémentaire est simplement l’attribution d’un « caractère » ou mesure d’une grandeur (comme les degrés de couleur, de température, d’angles etc…).

Chaque sommet de la clique « Tour Eiffel » est donc ce morceau d’information, un caractère spécifique de la tour (géométrie, couleur, apparence, histoire, constructeur, …). Ce caractère élémentaire peut bien entendu lui-même appartenir à des milliers d’autres cliques différentes. Par exemple le caractère « forme géométrique » est aussi celui d’autres cliques (chandeliers, courbe exponentielle, vases, etc..).

La clique « Tour Eiffel » a été le résultat d’un apprentissage, les neurones ou groupes de neurones ayant été activés en même temps plusieurs fois, les liens ont été renforcés. Au début de l’apprentissage des neurones (ou groupes de neurones) sont recrutés au hasard. Cela explique aussi le côté redondant et résilient du cerveau. Il n’y a pas un seul caractère «angle droit » ou « couleur bleu ciel » mais des milliers, et il y a la place pour en créer de nouveaux si une partie du cerveau se trouve endommagée.

L’intérêt de ce type de codage (la clique) est la grande capacité à se réparer : si une ou plusieurs liaisons sont brisées, cela n’empêche pas la clique de restituer facilement (le processus est expliqué plus loin : par exemple une clique à 13 sommets peut être complètement définie par 7 arêtes alors que toute entière elle en compte 78 !)

De plus il suffit que l’un des sommets soit excité. Par exemple : physiquement il peut s’agir de l’œil qui repère une courbe ressemblant à la ligne de la tour. Le signal électrique en provenance de l’œil déclenche des neurones de la périphérie et c’est alors l’allumage d’un des neurones ou groupes de neurones qui est alors en action. Ces derniers vont « pulser » des trains de décharge et c’est leurs « contacts » de cliques qui vont recevoir le plus de décharges, donc qui vont être retenus).

Le modèle explique bien aussi comment les « cliques parasites » sont éliminées. Dans cet immense labyrinthe enchevêtré, la clique qui doit s’allumer le fait simplement. Un peu comme si dans un stade de foot des spectateurs disséminés mais partageant un caractère commun (même profession ou même mois de naissance par exemple) pouvaient se lever en même temps, sans que les autres le fassent. Chaque spectateur est comme une microcolonne du cortex (en gros une centaine de neurones). Il faut imaginer un stade de 1 milliard de spectateurs et chaque spectateur peut être choisi pour être le sommet d’une clique au sein d’une grappe de spectateurs homogènes (une rangée par exemple).

Réflexions personnelles :

Je pense que le code génétique dès l’embryon, permet de câbler des liens entre les nerfs moteurs activant les muscles et des cliques dans le cerveau (toujours au même endroit). De même les sens (vue, odorat etc..) sont aussi pré-câblés. Des compétences acquises doivent aussi avoir des schémas pré-définis : les émotions, la cartographie du corps, l’orientation dans l’espace, les alarmes de danger, les réflexes, etc….  Le bébé entre très tôt dans une phase de grande opérations de câblage : la neurogenèse est super active pendant toute l’enfance et l’adolescence, les aires du langage se câblent à grande vitesse. Des neurones poussent partout et tissent des liens à tout va. Les cliques se forment par hasard, combinent des infons qui sont affectés à des concepts, des pensées, … L’apprentissage est synonyme d’activations répétées des cliques, comme si on renforçait à chaque passage le dessin de la clique. Apprendre « par cœur » est ce travail de répétition, les techniques de rappel, la ménotechnique est affaire de corrélation. On ajoute un lien entre deux cliques et le rappel de la première active la deuxième.

L’oubli est aussi un processus nécessaire : la place n’est pas illimitée et ce qui n’est pas activé est effacé, ou recruté pour d’autres cliques. Mais il arrive qu’une clique surgisse du passé, c’est la madeleine de Proust.

Pour Michel Jouvet, grand expert du sommeil, c’est durant le sommeil paradoxal que les connexions se renforcent ou disparaissent, en fonction du vécu de la journée.

Le langage est aussi bien entendu affaires de cliques et c’est certainement dans les aires du langage du cerveau que se sont créées les plus belles cliques: chaque lettre peut être un sommet de cliques, chaque mot aussi. Un poème appris est l’exemple typique d’un apprentissage d’une grosse clique. La sémantique permet de naviguer de cliques en cliques, les synonymes sont des sommets communs de cliques porteuses de sens différents.

La pensée est certainement le déroulement successif de milliers de cliques qui s’allument successivement. Laisser vagabonder son esprit c’est certainement surfer de cliques en cliques, portés par des vagues de sommets communs. Les analogies sont les traits d’union. Je pense à mon chat, puis à ses poils (son pelage est remarquable), puis à l’été (c’est la période de mue), puis aux vacances, puis au Brésil (prochaine destination), puis au foot (il y a eu récemment France-Brésil), … Voilà la déformation d’un esprit masculin qui converge vers des centres d’intérêts attracteurs classiques …

La méditation semble être justement le contraire : éviter de rebondir de cliques en cliques, se poser dans un mode stable et non excité. Une des méthodes consiste d’ailleurs à « détourner » la pensée vers un attracteur neutre comme « écouter sa respiration ». On évite ainsi le dérapage de l’enchaînement de pensée.

L’hypnose est maintenant comparée à un mode d’extrême attention focalisée : je me demande si l’on n’est pas non plus dans un « bassin d’attraction » d’un ensemble de cliques, avec peu de routage à l’extérieur.

Résonance : depuis très longtemps j’aime beaucoup ce concept de « coordination exceptionnelle », propriété de la résonance. En mécanique la résonance se manifeste par une forte amplitude d’interaction lorsque deux systèmes partagent une même fréquence. Des soldats marchant au pas sur un pont peuvent le faire vibrer dangereusement (voire l’effondrer) en fonction de la cadence des pas. Quand on « résonne » avec un autre on vibre donc de façon démultipliée. L’aspect ondulatoire des décharges neuronales est encore bien mystérieux : il y a aussi certainement des coordinations, des synchronisations dans les modes d’activations des cliques. Pour les auteurs, dans le cortex, tout ce qui s’active ensemble doit pouvoir se retrouver ensemble.

Le rythme des pulsations des décharges doit donc aussi avoir un rôle, mais lequel ? On connaît bien sûr les différentes fréquences données par l’encéphalogramme. Mais c’est une observation bien générale.

Beaucoup diront que rien n’est dit sur les circuits émotionnels, la douleur, la récompense, etc… C’est certainement à un deuxième niveau (réseau de « réseaux » ou réseaux de cliques) que la modélisation doit continuer… Encore plus compliqué ?

Parmi les ouvrages majeurs qui m’ont aidé à comprendre et à avancer sur ce sujet, je citerai :

« Petite Mathématique du Cerveau » par Claude Berrou et Vincent Gripon

« Plus vaste que le ciel » Par Gérald Edelman 

« L’erreur de Broca » par Duffau

« L’erreur de Descarte, la raison des émotions » par Antonio Damasio

« Le code de la conscience » par Stanislas Dehaene

« Du vrai, du beau, du bien » par JP Changeux

« Matière à pensée » par JP Changeux

Physique

A la fin des années 70, il y avait une émission mensuelle que j’adorais le mardi soir, c’était « L’avenir du futur ». Je me souviens qu’il fallait parlementer avec les parents pour regarder le débat qui s’éternisait après un bon film de science-fiction en général.

C’est là que j’ai écouté pour la première fois Hubert Reeves, et certainement que j’ai pris goût aux grandes questions de la physique : l’Univers, la matière etc…

La Physique a le privilège de traiter les infinis : le grand avec l’Univers et le petit avec le monde quantique. Son problème est d’ailleurs de ne pas réconcilier les deux. J’ai passé des heures à lire des ouvrages sur la mécanique des cordes, la théorie la plus à la mode pour unifier la relativité et la mécanique quantique.  Je me suis évertué à essayer de comprendre pourquoi il fallait se projeter dans un monde à 12 ou 13 dimensions ou plus. (Lire Brian Green « L’univers élégant »). Encore une fois les mathématiques sont d’un niveau assez élevé et il faudrait s’investir beaucoup plus (que je ne l’ai fait) pour apprécier.

Je me souviens des cours de physique en maths sup et maths spé à Saint Louis et les premières remises en cause des concepts du temps, de l’espace … Le temps et l’espace étaient devenus des notions imbriquées, dynamiques, liées à la vitesse de l’observateur. Le temps s’écoule plus lentement quand on va vite ! Grâce encore à des mathématiciens et leur génie de généraliser et d’inventer des extensions, Einstein a pu concevoir sa géométrie hyperbolique de l’espace (inventée par Lobachevski) et l’espace de Minkoski a fourni les lignes d’univers et les quadrivecteurs (avec l’utilisation plus tard des matrices). Côté mécanique quantique, avec les matrices introduites par Heisenberg et les espaces de Hilbert (généralisation des bons vieux espaces euclidiens) la mécanique quantique est d’un formalisme mathématique remarquable.

Donc parmi mes passions préférées, la plongée dans ces concepts abstraits a toujours été source d’émerveillement. Le débat de la place du hasard avec l’onde de probabilité associée à toute particule, les notions troublantes de connexion à distance avec l’intrication quantique, l’énigme de la gravitation, le vide quantique source d’émergence de particules …

Toutes ces questions sont souvent au cœur de l’actualité de la recherche : on vient de découvrir le boson de Higgs, on a mis en évidence les premières ondes gravitationnelles … Le savoir accélère et c’est extraordinaire de vivre cette course.

Nous vivons dans un espace accessible seulement pas nos perceptions limitées et c’est assez frustrant en fin de compte. Nous n’avons qu’une approche à notre échelle et même si les instruments, microscopes les plus puissants, télescopes embarqués dans l’espace, nous permettent de voir toujours plus petit et plus loin, il n’en demeure que nous sommes dans une sorte de bulle.

Parmi les mystères encore à percer, il y a ces fameuses énergie noire et matière noire manquantes.  Sommes-nous sûr d’ailleurs totalement sûrs de ces manques ? La gravitation est contrée par une force plus puissante répulsive qui éloigne les galaxies les unes des autres.

Quelques références qui m’ont tenu en haleine :

Bernard d’Espagnat : Le réel Voilé, Candide et le Physicien.

Gilles Cohen-Tannoudji et Michel Spiro : Le Boson et le chapeau mexicain

Joseph Silk : le Futur du Cosmos

Mathieu Ricard et Trinh Xuan Thuan : L’infini dans la paume de la main

Trinh Xuan Thuan : le chaos et l’harmonie

Trinh Xuan Thuan : désir d’infini

http://www.trinhxuanthuan.fr/